Mayotte est si proche mais si loin de nous. Nous sommes plus au courant de ce qui se passe aux Etats Unis qu’à 3 heures d’avion de chez nous.

Mayotte est une île de l’archipel des Comores, situé au milieu du canal de Mozambique, entre l’Afrique et Madagascar. Elle a été marquée par l’histoire du monde maritime de l’Océan Indien, longtemps dépendante de la traditionnelle navigation saisonnière arabo-indienne, et de l’irruption de ses marges, africaines et malgaches, avant de passer petit à petit sous hégémonie européenne. L’islam tolérant et structuré qu’elle a préservé indique un vieil héritage shirazien, apporté par des colons de la région d’Ormuz et du Hadramaout.
L’île de Mayotte (« Mawutu ») est mentionnée pour la première fois en 1490 sous la plume du navigateur arabe Ahmed Ibn Majid, signe d’une montée en importance au niveau commercial. Les Portugais entament des relations commerciales à partir de 1557, avec la visite de la flotte de Baltazar Lobo da Sousa.
Jusqu’à la fin du XVe siècle, l’île de Mayotte est morcelée en territoires indépendants commandés par des chefs, les « Fani ». Ces derniers, hommes ou femmes (islamisés comme en témoignent les patronymes musulmans que la tradition leur attribue) constituent une aristocratie d’influence swahili et malgache héritière des siècles passés. Venu d’Anjouan où le clan shirazi est établi depuis plusieurs générations, Attoumani ben Mohamed, par mariage avec la fille du puissant fani de Mtsamboro (Mwalimu Poro) fonde la première dynastie princière de l’île.
De ce mariage naquit Jumbe Amina qui épousa le sultan d’Anjouan, Mohamed ben Hassan. Par ce mariage, le sultanat d’Anjouan, dominant déjà Mohéli, étendait son influence à Mayotte. De ce mariage naquit Aïssa ben Mohamed. Celui-ci hérita, par sa mère Amina, du droit de régner sur le sultanat de Mayotte, qui dès lors affirma son indépendance vis-à-vis du sultanat d’Anjouan. La capitale fut alors transférée de Mtsamboro à Tsingoni (« Chingoni ») vers 1530. En 1538 était inaugurée la mosquée royale de Tsingoni, en partie conservée aujourd’hui. Ce sultanat, perpétuellement menacé par les projets d’annexion comoriens et malgaches, est reconnu jusqu’au début du XIXe siècle. C’est de cette époque que date l’établissement de l’islam sunnite chaféite et de l’Islam chiite pratiqué à Mayotte.
À partir des années 1740, le sultanat de Mayotte subit les attaques répétées de son voisin anjouanais. La chronique du cadi Omar Aboubacar ignore pourtant cet aspect historique : cet auteur, « protégé » du sultan d’Anjouan Salim Ier, attribue davantage la ruine du sultanat aux razzias malgaches. Les sources historiques européennes signalent pourtant à plusieurs reprises ces incursions dont le principal enjeu est la capture d’esclaves qui sont ensuite vendus aux trafiquants négriers français. Parfois ceux-ci fournissent une aide précieuse lors de ces incursions et reçoivent comme salaire du sultan d’Anjouan des centaines de captifs.
Vers 1830, un chef de province militaire autonome de Madagascar, nommé par Radama Ier, roi des Hovas/Mérinas, s’assimilant au précédent roi décédé en 1828, vainc le roi des Sakalava, Tsy Levalou régnant à Iboina. Le roi déchu échappe à la haine des Hovas et d’une partie des siens, et s’enfuit de son trône avec sa cour et une fraction de son armée au-delà des rivages malgaches à Nosy Bé. Le sultan de Mahoré en guerre avec les îles voisines et souhaitant extirper la piraterie de ses rivages fait appel au service du souverain exilé, poursuivi et contraint de gagner sa vie en mercenaire.
Dès 1832, la souveraineté du sultan est restaurée sur l’île. Elle est enfin reconquise de haute lutte après trois longues années par le chef sakalave qui, séduit par la famille de son hôte, se convertit sous le nom Andrian Souly, il est plus tard nommé Andriantsoly après son mariage avec la fille du sultan et reçoit pour sa probité et sa loyauté une partie de l’île, puis hérite du sultanat.
Mais l’île au grand lagon ne cesse d’être l’objet des rivalités locales. En 1833, l’île est momentanément conquise par Mohéli, puis le 19 novembre 1835, le sultan d’Anjouan irrité par les nouveaux venus impose son arbitrage et en prend possession. En 1836, au terme d’épuisantes épreuves de force, le sultan de Mayotte obtient sa reconnaissance et l’indépendance de l’île.
Le 25 avril 1841, sous le règne de Louis-Philippe Ier, le royaume de France achète Mayotte au sultan Andriantsoly, qui est menacé par les royaumes voisins et préfère voir les deux îles rattachées à la France.
De cette période découle la domination coloniale et ensuite le semblant de décolonisation de la France qui débouche au referendum illégale au sens du droit internationale de 1976 intégrant Mayotte à la France jusqu’à la départementalisation récente.
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